CLINIQUE DU TRAUMATISME

     Les violences subies dans l’enfance, les accidents de vie, les maladies graves ou chroniques, les agressions causées par un tiers, confrontent au risque de séquelles physiques mais aussi psychiques, à des angoisses intenses. Les traumatismes psychiques nécessitent un soin psychique, sous peine de conditionner présent et avenir.

    Un psychotraumatisme peut s’initier lorsque la spontanéité du vivant et la confiance en soi, ou en l’autre, sont dénoncées par l’irruption de la « tyché » devenue mauvaise rencontre. Des angoisses déstructurantes et le sentiment de ne plus être en mesure de se protéger peut surgir après de tels vécus, vouant à la perte de maîtrise de ses comportements. Dès lors, l’intégrité psychique est en danger. 

    Le mécanisme du psychotraumatisme ou trauma s’identifie par ses manifestations trahissant le débordement du sujet après que l’effroi a sidéré: l’angoisse jusqu’aux crises d’angoisses, des troubles de la thymie et du comportement, une altération des rythmes physiologiques et hormonaux jusqu’à la chronicité. Des symptômes de déliaisons psychiques accompagnent ces manifestations tels pensées intrusives, hypermnésie, réminiscences obsédantes, troubles compulsifs, dissociations, déréalisations, phobies, décompensations thymiques et comportementales. Les mécanismes de défense usuels se révélant inopérants ou insuffisants, l’équilibre est affecté. Le sujet devient vulnérable et illisible pour lui-même et les autres, même lorsque le corps a pu être réparé. 

    Les conséquences intimes et sociales peuvent s’avérer dévastatrices pour les patient.e.s subissant un psychotraumatisme. De nombreux réaménagements psychiques s’initient en conséquence, dont il convient de s’assurer qu’ils ne soient pas destructeurs. 

    Dans la maladie engageant un diagnostic vital ou la maladie chronique, l’agression est interne et le silence usuel des organes qui soutenait le refoulement de notre mortalité n’est plus, chacun.e est renvoyé.e à son ontologique solitude, l’angoisse de mort surgit, massive ou diffuse. Réajuster les représentations de la maladie et de ses conséquences lorsque celles-ci sont aggravantes et irréalistes, permettre d’admettre la traversée des temporalités subjectives et leur écart aux temps médicaux objectifs, respecter la singularité de chacun.e, patient.e renvoyé.e de fait à des protocoles de soins et statistiques, s’avère essentiel. Là se tient la.le psychologue.

    Les victimes d’agressions causées par un tiers font également face à une rupture d’homéostasie somatique et psychique. Après la peur, la sidération, les troubles post-traumatiques invalidants (TSPT), leurs conséquences physiques, financières, juridiques, sociales, disent les traces dans la réalité de la violence subie. Dans l’intime, les affects sont destructeurs, la honte, le secret, voire une irrationnelle culpabilité, engendrent une étrangeté à soi et aux autres, aggravée par les préjugés sociaux et la stigmatisation, ou l’indifférence.

     « Je est un autre » défait et le monde est devenu absurde ou hostile pour les victimes de traumas, sans maîtrise ni sublimation accessibles a priori, laissant impuissant.e. Le recouvrement de l’unité psychique est pourtant possible, en retissant des bords au « trou-matisme », qui ne sera plus hémorragique et n’envahira plus tout l’espace psychique, ne réduira plus à l’identité victime, sans la dénier. La reconstruction d’un lien à d’autres de confiance peut de nouveau être envisageable. 

    Lors d’un psychotraumatisme avéré, une psychothérapie de soutien aide à remobiliser les pulsions de vie face au réel qui « cogne ». Accueillant les mots et les récits, les affects et ressources en présence, à l’écoute des parcours singuliers, la.le psychologue évalue le trauma et s’emploie à en soulager les manifestations symptomatiques, par différentes techniques psychothérapeutiques, complémentaires. Il peut également être question d’un travail introspectif plus profond, accompagnant l’avènement d’une version de soi plus affirmée, par une proposition d’un « vivre avec » ce réel, bien au-delà de la survie. Parfois, l’accompagnement de fin de vie est l’objet du soutien.