CLINIQUE DE LA TRANSCULTURALITÉ

    L’exil, contraint comme choisi, soumet à des expériences de pertes ensuivies d’intenses adaptations. Les parcours de migrations exposent à des dangers, de violentes insécurités, des contingences précaires, alors même que des traumatismes ont souvent provoqué le départ. Les familles se voient séparées, les solitudes voire l’isolement sont mortifères,. La survie, physique, économique, psychique, sont en jeu. Les habitus du pays d’accueil, convoquant nouvelle langue et nouveaux codes sociaux, doivent être intégrés rapidement. 

    De tels vécus génèrent immanquablement des vulnérabilités physiques et psychiques. Peurs, angoisses, régressions pulsionnelles, désocialisation, accompagnent souvent ces parcours même lorsque la survie n’est plus en question. Or, dans un contexte global de crise économique et démocratique, d’aggravation des inégalités, de pertes de repères collectifs et de défiance et de recul des politiques publiques, nos sociétés sécrètent replis et peurs, cèdent aux fantasmes sécuritaires. L’altérité redevient menaçante. Les corps sociaux et politiques, dans un déni de réalité, se referment sur des conditions d’accueil retardant les rencontres incontournables entre migrants et citoyens de pays d’accueil. La transculturalité, enjeu d’enrichissement mutuel par apports d’une culture à l’autre, dans une reproduction inéluctable et féconde de l’histoire des civilisations et des grandes découvertes, se voit repoussée, au détriment de tous. 

    Toutes les recherches en sciences humaines concluent au bénéfice commun à favoriser la préservation des identités pour les sujets exilés. Les psychologues, en relation avec les acteurs médicaux et sociaux, peuvent accompagner ces parcours d’exil et permettre à chacun.e d’entrevoir un devenir possible dans le métissage sans se renier. La clinique transculturelle issue des recherches de l’anthropologie et de la sociologie, de la psychiatrie et la psychologie, soutient le respect de l’intégrité psychique inaliénable de ceux qui se voient contraints à l’arrachement à leur vie puis à l’adaptation à un nouveau territoire, une nouvelle langue, une nouvelle culture. 

    La.le psychologue offre un accueil et un espace sécurisé de parole, peut accompagner les différentes temporalités de la précarité ou de l’exclusion, la marginalisation que le processus migratoire inflige. Elle.il soutient la subjectivité de ceux qui se décrivent exilé.e.s y compris d’eux-mêmes, pour toujours et partout. Au fil de leur nouvelle vie, les exilé.e.s peuvent, dans ce cadre protégé, mettre en mots les réaménagements identitaires coûteux avant que d’être fructueux, lutter contre les clivages qui les menacent en dissociant leurs transmissions générationnelles de leurs expériences nouvelles. La psychothérapie de soutien propose ici une recréation de liens sociaux dans un monde globalisé. 

    En somme, il est proposé à chacun.e de soutenir la voie d’une découverte heureuse des nouvelles cultures sans renoncement aux mémoires ni à son individualité.  Construire avec les patients des entre-deux viables, de nouveaux liens sociaux sans renier le sujet, telles sont les perspectives de cette clinique.